Témoignage de Lise Bourbeau
Fullémo réalise un recueil de témoignages permettant d’une part, de sensibiliser au rôle et à l’impact des émotions dans le travail et d’autre part, de libérer la parole émotionnelle en entreprise.
Il s’agit de répertorier les bonnes pratiques sous forme d’interviews écrites autour de six questions dont les réponses contribuent à l’éveil général.
Par ces partages d’expériences issues de tous types d’environnements, nous souhaitons diffuser des grilles de lecture, des trucs et astuces, des manières d’aborder les situations qui peuvent résonner et inspirer nos lecteurs.
Notre intention à travers ces éclairages est d’aider nos lecteurs à lutter contre la fatigue émotionnelle et favoriser leur épanouissement professionnel.
Pour en savoir plus sur les motivations à l’origine de ce recueil de témoignages : cliquez ici
Lise Bourbeau est une auteure, conférencière, coach canadienne, elle a également fondé le centre de relation d’aide et de développement personnel Écoute Ton Corps et a publié plusieurs livres dont « Les 5 blessures qui empêchent d’être soi-même ».
Lise nous parle du plaisir que lui procure son travail d’accompagnement et de transformation des individus.
Merci Lise d’avoir partagé si simplement votre expérience du développement personnel !
1. Comment définissez-vous votre métier ?
Lise Bourbeau : Je le décris comme le plus beau métier au monde !
Parce que c’est un métier qui me fait avancer énormément. Ce travail, je l’effectue exclusivement pour moi. De nombreuses personnes me disent merci parce que quelque chose a changé dans leur vie, parce que nous avons fait quelque chose ensemble, nous avons mis en application ce qu’ils ont lu. Avoir lu mon livre ne fait pas tout, il faut faire les choses différemment.
Tout au long de mon enseignement, je me parle et je ne peux oublier ce que j’enseigne. Je me sens tellement privilégiée de gagner très bien ma vie à parler d’amour tout le temps, à aider les gens à se découvrir, à apprendre davantage sur eux, à savoir pourquoi cela ne va pas comme ils veulent dans leur vie, ce qu’ils veulent être, ce qui les anime.
Je suis une éveilleuse de conscience, c’est sûr.
Je suis « madame question ». Depuis que je suis toute petite, j’ai toujours aimé poser des questions. Certaines questions font rire, d’autres embêtent les gens. C’est plus fort que moi. Je veux toujours apprendre des choses, c’est ce qui m’anime le plus.
Tous ce que j’enseigne dans les livres ou les ateliers est toujours sous la forme de questions. Les gens repartent avec des outils concrets. Si ils ont un problème : de relation dans leur couple, leur travail, une maladie, ils peuvent sortir la feuille de questions et découvrir ce qu’ils ont à apprendre de l’expérience en se posant les bonnes questions.
2. Quel est le sens que vous donnez à votre Job ?
Lise Bourbeau : C’est l’idée de toujours se rappeler qui nous sommes et où nous allons.
Le bon sens du travail est de toujours apporter du bonheur, de l’amour, des transformations agréables.
Je ne me suis jamais posée cette question dans ce sens-là : « Quel est le sens de mon travail ? ».
Quel que soit son travail, il faut toujours se souvenir de : « qu’est-ce que j’apprends et qu’est-ce que je découvre ? ». J’ai toujours quelque chose à apprendre des autres. Si je rencontre des difficultés à accepter quelque chose de quelqu’un d’autre, c’est que j’ai du mal à l’accepter de moi-même.
Le sens, dans la base de mon enseignement, c’est la notion de responsabilité : parce qu’une personne qui ne sait pas que c’est elle qui crée sa vie va toujours rencontrer des difficultés personnelles et professionnelles. Ceux qui attendent que ce soit les autres qui leur disent « merci c’est génial » pour se sentir bien, c’est dommage car ils vivent avec des attentes. Il faut que cela vienne de soi.
Si je suis assise toute la journée devant mon ordinateur et que je finis la journée fatiguée, c’est parce que j’ai oublié de donner du sens à mon travail, de regarder ce que cela m’apporte, les talents que je développe pour faire ce que j’ai fait. Toute notre vie est ainsi. Les gens qui terminent une journée de travail et sont vidés d’énergie, ce n’est pas la journée de travail qui les vide d’énergie, c’est leur état d’âme.
3. Quels impacts ont vos émotions sur votre travail ?
Lise Bourbeau : Tous les humains vivent des émotions, il faut accepter que cela fasse partie de l’être humain. J’ai la chance d’avoir des outils qui ont à faire avec les émotions.
Quand on vit des émotions, c’est toujours parce que notre égo a pris le dessus. Si une personne ou une situation me fait vivre des émotions au travail, ce n’est jamais l’autre, c’est moi : il y a quelque chose en moi qui attire ça. C’est cela être responsable.
Ce n’est pas grave. On prend une bonne respiration et on se dit « bon ok. Qu’est ce qui fait que ça m’arrive ? Que puis-je apprendre de ça ? Est-ce que je peux voir la situation avec un œil différent ?, L’autre n’a peut-être pas voulu me juger ou me faire du mal ? ». Cela permet de poser un nouveau regard sur les choses.
Pour moi, une émotion est toujours quelque chose de désagréable, c’est quand l’égo prend le dessus. Si je vis de la joie, du bonheur « je suis fière de moi, j’ai passé une bonne journée… », c’est un sentiment de joie et non une émotion. Je fais la différence entre émotion et sentiment car je me suis rendue compte que les gens mettaient tout dans le même panier et s’empêchaient de sentir car ils pensaient que tout était émotion. Avec cette distinction, on se donne le droit de sentir des choses agréables. Si c’est désagréable, on sait que ce n’est plus un sentiment mais une émotion et que c’est l’égo qui affecte.
Les émotions désagréables sont associées à des enjeux d ’égo : on n’est plus dans notre cœur. Si on ne s’accepte pas, ou si on n’accepte pas une situation ou une personne, c’est un problème d’égo. Dès que l’égo prend le dessus, c’est qu’on n’est pas dans notre cœur. Les peurs, c’est la petite voix de l’égo qui dit : « ça n’est pas supposé être comme ça, pourquoi ? ». Tout ce qui apporte des peurs, un malaise, indique que c’est l’égo qui a pris le pas dans notre vie et qu’on n’écoute plus notre cœur.
Les émotions positives sont des sentiments, on n’a pas besoin de s’en servir, juste de les reconnaître.
La peur, on pourrait penser que c’est une émotion. Mais quand j’ai peur, je respire, je me regarde et je me donne le droit d’avoir peur, cela devient alors un sentiment. Il n’y a plus de malaise, de crispation, de stress. Regarder ma peur me permet de la mettre de côté, de ne pas la subir. Quand il y a un malaise, du bien, du mal, correct pas correct, supposé pas supposé, c’est l’égo, un système de croyances au bien et au mal, cela vient du mental, on n’est pas dans notre cœur.
4. Racontez-moi une expérience dans laquelle vous vous êtes sentie dépassée par vos émotions (ou vous avez craint d’être dépassée) ?
Lise Bourbeau : La pire journée de ma vie : je partais faire un atelier au Japon, un atelier organisé depuis un an pour cent personnes. Ma sœur me dépose tôt le matin à l’aéroport et à l’enregistrement, je me rends compte que je n’ai pas mon passeport. Impossible de retrouver le passeport, même à la maison. Tout était réuni pour que j’annule cette intervention, mais je ne voulais pas : « Il n’en est pas question, il faut que j’y aille ! ». La journée a été épouvantable, une course folle. Après quelques péripéties, j’ai finalement réussi à avoir un passeport dans la journée.
Dans la soirée, quand je me suis retrouvée dans l’espace Business de l’aéroport, je me suis posée et j’ai pleuré, je n’en pouvais plus. Cela a été la journée la plus stressante de ma vie. Mais j’y suis arrivée !
Je suis arrivée le lendemain à 16h30 pour commencer à 17h, je n’ai même pas eu le temps de prendre une douche. J’ai animé le premier atelier de 17h à 22h et enchaîné les 2 jours suivants avec 19h d’avion et 14h de décalage horaire. Je n’ai jamais pu me reposer. Je ne sais pas comment j’ai tenu. Même l’organisatrice ne s’est pas aperçue que j’étais fatiguée.
Je considère que j’ai vraiment eu de l’aide « de l’au-delà ». On entend des situations dans lesquelles des parents arrivent à sauver leur enfant et on ne sait pas comment ils ont pu le faire, d’où ça vient. Là, c’était pareil. Dans l’atelier, j’étais là, je ne sais pas d’où venaient mes forces. On fait des choses et on ne sait pas comment on arrive à les faire. C’est là qu’on voit le grand potentiel de l’être humain.
J’ai surmonté cette fatigue, alors que j’avais déjà plus de 70 ans. Toute une expérience !
5. Quelles sont vos techniques pour rester confortable dans des situations qui vous impactent émotionnellement ?
Lise Bourbeau : J’essaie vraiment d’être dans le moment présent de ne penser à rien d’autre. Une minute à la fois : la journée va passer, tout finit par passer, par devenir un souvenir, ça fonctionne pour beaucoup de choses. Je me dis ça va passer », je vais comprendre des choses. « Pourquoi j’ai attiré une situation comme ça ? je vais comprendre des choses et en sortir meilleure ». Relativiser l’enjeu est très important.
La respiration est pour moi très importante, vitale. C’est malheureux, les gens oublient de respirer. Il faut vider les poumons, bien expirer. Je marche tous les jours et en marchant j’en profite pour faire mes respirations. Il y a différentes techniques de respirations, cela devient de plus en plus connu comme le fait Wim Hof qui reste longtemps dans le froid grâce à la respiration.
La technique la plus rapide que je pourrais partager quand il y a quelque chose qu’on n’aime pas, qui ne vas pas comme on veut c’est de se demander : « cela empêche quoi dans ma vie maintenant ? ». Cela m’empêche d’être serein, d’être calme. Cela signifie alors que mon plus grand besoin en ce moment est d’être calme. Que pourrais-je faire pour être calme ? On attire quelque chose qui nous empêche d’être. Il ne faut pas s’arrêter à ce que cela nous empêche d’avoir ou de faire, il faut identifier ce que cela nous empêche d’être.
Les grands perfectionnistes reportent, trouvent des excuses et finalement ne font rien. Si je pense « pour faire tel métier ou telle chose, je peux faire ça… » alors je fonce et j’y vais. C’est quand on a les deux pieds dedans qu’on va savoir si c’est bon ou pas pour nous, si cela contribue à notre bien-être. Cela nous fait vivre des expériences. Ce n’est ni bien ni mal.
6. Comment définissez-vous l’épanouissement professionnel ?
Lise Bourbeau : C’est tout ce qu’on a dit. C’est utiliser les situations et les gens autour de nous pour nous aider à mieux se connaître.
L’épanouissement, c’est toujours aller vers du mieux dans la vie.
Au niveau professionnel, des personnes pensent être épanouies car elles ont du succès. Pour moi, ce n’est pas cela une personne épanouie. Une personne épanouie doit savoir concilier sa vie personnelle, sa vie professionnelle et aussi s’occuper de son corps pour pouvoir être en bonne santé. Des gens travaillent, mais ne s’occupent pas de leur santé. On ne peut pas être épanoui quand c’est juste du succès, le succès favorise l’égo.
Pour moi être épanoui, c’est se sentir comme une fleur qui s’ouvre, quand tout est concilié.
En conclusion, je voudrais partager l’idée de juste se donner le droit d’être ce qu’on est à chaque instant. On peut avoir des buts, des projets mais sur la route se donner le droit d’être des humains.
La seule raison d’être de chaque humain est de vivre des expériences humaines en se donnant le droit d’être des humains. A ce moment-là on est dans notre cœur, on s’accepte tel que l’on est. Si par exemple, j’accepte d’être impatiente, je vais devenir patiente de plus en plus vite. La dimension mentale de l’humain ne peut pas comprendre ces notions spirituelles-là : plus je veux changer, moins je change. Plus j’accepte, plus je change, plus les choses vont bien pour moi. C’est cela qu’on doit tous reconnaître : on n’a pas besoin d’essayer de dépasser les autres et de prouver des choses.
Juste le faire avec soi : si je commence à m’aimer davantage les autres vont aussi m’aimer beaucoup plus, me faire des compliments, m’accepter.
Tout ce que je fais avec moi-même, je le reçois des autres et le fais avec les autres. J’appelle cela le triangle : tout ce que je juge chez les autres, les autres me jugent de la même manière et je me juge pareillement.
Tout ce que je donne à l’autre, les autres me le donnent et cela me revient.