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Santé mentale au travail : enjeux, obligations et leviers émotionnels pour agir

Santé mentale au travail : un sujet longtemps ignoré, désormais incontournable.

Les entreprises prennent conscience de son impact humain et organisationnel. Et si les émotions étaient la clé pour mieux la préserver ?

Santé mentale au travail : les enjeux

De quoi parle-t-on ?

La santé mentale au travail ne se résume pas à l’absence de troubles psychologiques.

Selon l’OMS, la santé mentale est un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté ».

Mathilde HELIES Formatrice accréditée par PSSM France pour dispenser la formation "Premiers Secours en Santé Mentale"

La santé mentale appliquée au monde de l’entreprise se réfère donc à un état d’équilibre dans lequel une personne peut faire face au stress, réaliser son potentiel, travailler de manière productive et contribuer à la vie de son équipe.

La santé mentale inclut

  • l’état émotionnel du collaborateur,
  • la charge mentale liée aux exigences du poste,
  • la qualité des relations professionnelles,
  • et la possibilité d’exprimer ses ressentis sans crainte.

Un sujet encore trop tabou

Quand j’ai commencé à sensibiliser les entreprises en conférences sur le rôle et l’impact des émotions en entreprise -c’était en 2010-, j’apparaissais comme une ovni ! Parler des émotions en entreprise relevait de l’acte de résistance ! Systématiquement certains participants s’offusquaient en me disant « les émotions en entreprise c’est tabou! ».

Aujourd’hui, c’est la santé mentale qui suscite malaise ou silence. Le tabou s’est déplacé. Pourtant, c’est en travaillant avec nos émotions — et non contre elles — qu’on peut agir efficacement.

État des lieux alarmant

La santé mentale au travail n’est plus un sujet secondaire : elle est aujourd’hui l’un des principaux enjeux RH et sociétaux.

Quelques repères clés : les études

  • 45 % des salariés français se déclarent en détresse psychologique, selon le baromètre 2025 d’Empreinte Humaine – une tendance en forte hausse ces dernières années.
  • Un salarié sur deux estime que son travail a un impact négatif sur sa santé mentale. Les raisons évoquées concernent des facteurs tels que la charge émotionnelle, le manque de reconnaissance ou le déséquilibre entre vie professionnelle et personnelle. C’est ce que révèle le rapport IFOP pour la Fondation Jean-Jaurès (2022), page 28.
  • L’absentéisme pour troubles psychologiques est en forte hausse, devenant la première cause d’arrêts longs en France, devant les troubles musculo-squelettiques. Source : IFOP pour la Fondation Jean-Jaurès (2022)
  • J’en profite pour souligner que la durée moyenne d’arrêt pour cause de burn-out est de 14,6 mois. Ces chiffres sont donnés par une étude belge soutenue par l’INAMI en 2023, sur la durée moyenne d’incapacité de travail chez les personnes diagnostiquées en burn-out. La durée varie considérablement en fonction de la gravité des symptômes et de la rapidité de la prise en charge, d’où l’importance de la prévention !
  • 42 % des répondants à une enquête de la Fondation Jean-Jaurès déclarent aller « mal », et 9 % se disent même « au bout du rouleau ». Ces chiffres mettent en lumière l’ampleur du malaise psychologique au sein de la population active.Source : IFOP pour la Fondation Jean-Jaurès (2022)

Ces données soulignent l’urgence d’une action collective pour préserver la santé mentale au travail, en mettant en place des stratégies de prévention et en favorisant un environnement professionnel sain et bienveillant.

Le burn-out : une maladie professionnelle à reconnaissance partielle

Le burn-out, ou épuisement professionnel, est aujourd’hui largement reconnu comme un trouble psychosocial lié aux conditions de travail. Pourtant, il ne figure pas officiellement dans les « tableaux de maladies professionnelles ». Ces tableaux sont utilisés pour déterminer les maladies qui donnent ou pas lieu à des indemnisations, on comprend l’enjeu économique !

D’après la loi Rebsamen (2015), une pathologie psychique ne peut être reconnue d’origine professionnelle que si elle entraîne une incapacité permanente d’au moins 25 %, ce qui en limite considérablement la reconnaissance officielle.

Une obligation légale pour les employeurs

Il est important de le rappeler, depuis la loi sur les risques psychosociaux (RPS), l’employeur a l’obligation de protéger la santé mentale de ses salariés. Il doit protéger la santé mentale au même titre que leur santé physique (article L.4121-1 du Code du travail).

Cela implique :

  • L’évaluation des risques psychosociaux (charge émotionnelle, conflits, isolement…)
  • La mise en place d’actions de prévention
  • L’accompagnement du management sur les sujets de stress, charge mentale et vulnérabilité

Quels impacts sur les personnes et les entreprises ?

Sur les individus :

  • épuisement, anxiété, perte de sens, isolement, rupture
  • baisse de confiance, d’engagement, d’estime de soi

Sur les organisations :

  • turnover accru, baisse de performance, tensions internes
  • image employeur dégradée, difficulté à attirer, fidéliser et engager les collaborateurs
  • risques juridiques et humains

La sécurité psychologique : un pilier pour prévenir

Inspirée des travaux d’Amy Edmondson (Harvard), la sécurité psychologique désigne la capacité à exprimer ses idées, ses doutes, ses émotions sans peur du jugement ou de la sanction.
Elle est au cœur d’une culture managériale qui protège la santé mentale. Et c’est là que l’intelligence émotionnelle appliquée prend tout son sens. Ses recherches ont montré que la sécurité psychologique est un facteur clé pour encourager la collaboration, la créativité et l’engagement des employés.

Pourquoi les émotions sont un levier puissant

Pendant longtemps, les émotions ont été perçues comme un facteur perturbateur dans le monde professionnel — synonymes d’irrationalité, d’instabilité ou de faiblesse. Pourtant, c’est exactement l’inverse : elles sont un outil de régulation, de connexion et de prévention.

Dans le cadre de la santé mentale au travail, les émotions jouent un rôle central pour plusieurs raisons :

Elles signalent une surcharge ou un désalignement

Les émotions agissent comme des indicateurs précoces très précieux : une irritation constante peut signaler un excès de pression, une lassitude prolongée peut cacher une perte de sens, une anxiété récurrente peut révéler une insécurité professionnelle ou relationnelle. Apprendre à reconnaître ces signaux permet d’agir avant que le mal-être ne s’installe durablement.

Connaissez-vous la durée d’une émotion ?

La neuroanatomiste américaine Jill Bolte Taylor parle du concept de durée physiologique des émotions.

Ainsi, lorsqu’une émotion est déclenchée (peur, colère, tristesse…), la réponse chimique dans le corps — hormones de stress, activation du système nerveux — dure environ 90 secondes.

Ce qui se passe biologiquement
  • L’amygdale (centre des réactions émotionnelles) réagit à un stimulus,
  • Une cascade hormonale est déclenchée (adrénaline, cortisol…),
  • Le corps entre en réaction (accélération cardiaque, tension musculaire, etc.),
  • Au bout de 90 secondes, si rien n’est relancé cognitivement, la chimie s’autorégule et l’état corporel revient à l’équilibre.
Le rôle de l’esprit

Passé ce délai, si l’émotion persiste, c’est le mental qui la relance : par des pensées, des ruminations ou une narration interne qui ravivent le circuit émotionnel. Et je constate quotidiennement la tendance naturelle que nous avons à interpréter, réinterpréter et ruminer puis ruminer encore. C’est une tendance de fond qui nous tire vers le bas !

Elles favorisent l’auto-régulation et la résilience

Une personne qui sait nommer ce qu’elle ressent est plus à même de prendre du recul, d’adopter une posture adaptée et de retrouver un état d’équilibre.

Cette compétence émotionnelle est un pilier de la santé mentale : elle réduit le stress chronique, augmente la tolérance à l’incertitude et améliore la récupération après des phases de tension.

Elles nourrissent la qualité des relations au travail

L’intelligence émotionnelle permet de reconnaître et exprimer ses émotions, tout en comprenant celles des autres.
Elle améliore la communication, renforce la coopération et aide à prévenir les conflits en milieu professionnel.

Elle crée un climat de sécurité psychologique, condition essentielle à un environnement de travail sain (cf. les travaux d’Amy Edmondson, Harvard).

Elles donnent accès à l’alignement et au sens

Nos émotions profondes sont souvent liées à nos valeurs, nos besoins fondamentaux et nos aspirations.

Ce pourquoi, les écouter, c’est se donner les moyens de faire des choix plus alignés, de retrouver de la motivation et de l’engagement. Vous pouvez ainsi préserver votre santé mentale sur le long terme.

Les émotions ne sont pas un bruit parasite, elles sont un signal d’alerte et un levier de régulation. En les réhabilitant, on préserve durablement la santé mentale au travail.

Conclusion

Aujourd’hui, préserver la santé mentale au travail n’est plus une option : c’est une responsabilité collective, humaine et légale. Et c’est aussi une formidable opportunité de remettre l’intelligence émotionnelle au service du leadership, du bien-être et de la performance durable !

Et pour monter en compétences vous avez accès aux programmes Lémo !

Vos questions

Qu’est-ce que la santé mentale au travail ?

C’est un état de bien-être qui permet de gérer le stress, coopérer efficacement et s’épanouir professionnellement. Elle inclut les émotions, les relations, la charge mentale et le sens donné au travail.

Pourquoi la santé mentale est encore un sujet tabou ?

La santé mentale est souvent perçue comme un signe de faiblesse. Le manque de connaissance, la stigmatisation et la peur du jugement freinent encore sa reconnaissance et sa prévention en entreprise.

Quels sont les signaux d’alerte à prendre en compte concernant sa santé mentale?

Fatigue persistante, anxiété, perte de sens, isolement, désengagement, lassitude ou tensions récurrentes doivent alerter.

Le burn-out est-il une maladie professionnelle ?

Pas en France. Car il ne figure pas officiellement dans les « tableaux de maladies professionnelles ». Sa reconnaissance reste possible au cas par cas, via une procédure spécifique auprès de la CPAM, selon la loi Rebsamen

Quelles sont les obligations de l’employeur en matière de santé mentale au travail ?

Protéger la santé mentale fait partie des obligations légales (Code du travail, art. L.4121-1). Cela inclut l’évaluation des RPS, la prévention et l’accompagnement managérial

Quel est le lien entre santé mentale et émotions ?

Les émotions sont des signaux internes qui aident à réguler, prévenir le stress et favoriser des relations de qualité. Les comprendre renforce la santé mentale durablement.

Comment améliorer la santé mentale en entreprise ?

Former les équipes à l’intelligence émotionnelle, ajuster les charges, développer l’écoute managériale et créer une culture du dialogue sont des leviers concrets et puissants

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